scintillements
c’est l’heure où les ombres reprennent leurs places, silhouettes découpées sur fond d’un ciel encore bleu. bleu avant de s’assombrir. bleu sans toute sa profondeur, bleu avant le scintillement. les détails, tous ceux que le jour cache, apparaissent enfin, loin de leur pudeur diurne. ils s’exhibent, quittent leur insignifiante absence. ils découpent, transpercent le reste de clarté. dans quelques minutes les derniers reflets de l’astre du jour auront disparus et cette troupe aura pour partie retrouvé sa partie d’ombre et d’anonymat. quelques instants chaque jour, quelques instants entre le jour et la nuit, cet instant où tout pourrait être possible, cet instant où le droit du silence et du calme semblent s’exprimer au mieux. troupe éphémère qui ne s’exprime qu’entre deux, dans l’absence, sans jour ni nuit, obscure lumière de l’avant nuit.
des pas, le feutre des pieds nus sur le bitume surchauffé d’une journée caniculaire. loin des codes claniques, il devient possible de laisser aller la marche, l’imprécision du pas ou le hasard du regard. les premiers scintillements apparaissent. sonorités feutrées et pas lents sans hésitation, sûr de leur fait mais lents. une lassitude arrive puis disparait, « n’as tu jamais été chanceux » murmure la voix. les Laments se approchent. les formes ont changé d’apparence, une luminosité douce les accompagne tels de jeunes anges verticaux qui n’auraient pas encore tout à fait le contrôle de leurs ascensions. anges verticaux, anges déchus, le mirages des corps, des silhouettes. rien d’inquiétant, une tentation d’harmonie. échos des pas nus sur le sol. avancer au hasard sonore de la ville calmée par les ombres et la sérénité de la nuit. un léger frottement presque un flottement
chaque absence renforce le scintillement. cachés, tapis à l’abri des pollutions de la cité, les scintillements prennent forme et guident le voyageurs solitaire.
la nuit, cette nuit, ombre dissociée du jour. obscurité bienfaisante, synchronicité augmenté, le geste précis, tout redevient possible.
l’avant nuit a définitivement disparue, le voile de fraîcheur s’est installé. il est temps.
je me fond dans la nuit pour mieux exister, pour mieux disparaître…
Lhorens b. Sartori
ambiance : Vertical Angels (nus)